Mayotte : le profil très fragile des maternités précoces


Chaque jour, une jeune femme étrangère de moins de 18 ans donne naissance à un enfant à Mayotte. Souvent isolée de son environnement familial, elle est confrontée à des conditions d’habitat précaires et à une politique d’aide sociale particulièrement discriminatoire dans ce département français.


Plus de 10 000 enfants ont vu le jour à Mayotte en 2022, selon les fichiers de l’état civil. Soit 30 naissances chaque jour. C’est presque autant qu’à la Réunion, deux fois et demi plus peuplée.  Au-delà de ce dynamisme démographique fulgurant, l’archipel présente une autre particularité : le nombre très important de jeunes mères mineures de nationalité étrangère. Ce cas de figure concerne 389 enfants en 2022, soit un tiers du volume observé sur l’ensemble de la France. 

A Mayotte, la maternité précoce se déroule déjà dans un contexte très délicat en raison du manque de structure d’accompagnement des jeunes mères, d’un régime d’exception en matière d’aides sociales et de la grande précarité. Le statut de ces jeunes mères de moins de 18 ans rend leur situation encore plus fragile. 83% d’entre elles sont étrangères. Une proportion plus importante que pour l’ensemble des naissances (77%).

8 ans d’écart avec le père

Si l’essentiel des naissances a lieu tout au long de l’année, on observe depuis 2018 une forme saisonnalité pour une partie d’entre elles, avec un pic au mois d’avril. Ces fichiers d’état civil fournissent également des informations sur le profil du père. A Mayotte, ce dernier est plus âgé de 8 ans en moyenne dans le cas des mères de moins de 20 ans. Soit deux ans de plus que l’écart observé sur l’ensemble des naissances. 

Le régime d’exception en vigueur dans ce département contribue à maintenir ces jeunes mères dans une situation de précarité. L’aide médicale d’Etat. Le RSA n’est pas accordé aux étrangers qui résident à Mayotte depuis moins de 15 ans et une femme étrangère ne peut pas prétendre à l’Aide Médicale d’Etat (AME) ou à la Couverture médicale Universelle (CMU), qui ne sont toujours pas appliquées à Mayotte. Les règles d’attribution des prestations familiales y sont plus sévères qu’ailleurs en France, de nombreux dispositifs de soutien à la parentalité ne sont pas encore déployés. 

Un accueil sanitaire défaillant

Depuis 2012, le code de la santé publique prévoit une prise en charge complète des soins urgents des mineurs et femmes enceintes dans les établissements publics. Mais cette disposition n’est pas toujours appliquée sur le terrain, selon les témoignages recueillis par Médecins du Monde. Le “bon rose” dédié aux femmes enceintes en situation de précarité est parfois délivré de manière discrétionnaire par les bureaux d’accueil de l’hôpital de Mamoudzou ou des dispensaires. 

L’insertion de ces jeunes femmes sera d’autant plus complexe que les structures d’accueil de la petite enfance sont quasiment inexistantes sur l’archipel : les crèches couvrent seulement 4% des besoins sur la population officiellement recensée. En Bretagne ou en Pays de la Loire, par exemple, 70% des enfants de moins de 3 ans peuvent être accueillis en crèche. 

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