La population guyanaise croît plus vite que le corps médical, dégradant l’accès aux soins


Déjà sous-dotée en professionnels de santé, au regard de sa population et de son étendue, la Guyane a subi une dégradation des conditions d’accès aux médecins généralistes entre 2015 et 2018. C’est ce que révèle un indicateur mis au point par le service statistique (Drees) du Ministère de la Santé. Au-delà de ces difficultés d’accès, en 2023, la proportion de professionnels de santé reste plus faible qu’aux Antilles et que dans l’hexagone.


En se basant sur la densité moyenne de médecin en France, la commune de Camopi, très isolée et étendue mais peuplée de plus de 1 800 habitants, devrait compter 6 médecins. Un seul est en poste à temps complet au centre de Santé, même si le centre hospitalier de Cayenne met désormais à disposition une équipe mobile selon les besoins. Cette situation reflète ce que vivent de nombreux habitants du département, marqué par un croissance démographique rapide et une dispersion de l’habitat qui rendent d’autant plus complexe le rattrapage du retard en matière d’accès aux soins.

En janvier 2023, la Guyane compte 717 médecins, selon la base de données de la Drees, soit 238 pour 100 000 habitants, contre 338 pour la France entière. Plus de la moitié de ces médecins exercent en hôpital public (52%, contre moins de 25% à l’échelle nationale). Les médecins libéraux, moins nombreux, ont aussi une moyenne d’âge un peu plus élevée (56 ans) qu’aux Antilles.

4 fois moins d’orthophonistes

L’accès aux dentistes est aussi problématique. Si les Antilles et la Réunion sont aussi bien dotées qu’en moyenne nationale, la Guyane en compte proportionnellement deux fois moins, avec seulement 88 professionnels inscrits. Le même constat peut être dressé pour les pharmaciens. Le nombre d’orthophonistes est minime : seulement 25 inscrits, soit 4 fois moins que dans l’hexagone (une dizaine de départements français se trouve dans une situation similaire). Seul le nombre de sages-femmes est surreprésenté en Guyane, comme dans les autres régions d’outre-mer, avec près 67 professionnelles pour 100 000 habitants (36 en France).

Le nombre de lits d’hospitalisation est inférieur de 15% aux taux constatés dans l’hexagone. Fin 2018, on comptait 260 lits pour 100 000 habitants (médecine, chirurgie, obstétrique, odontologie). Au regard de la population, il y a aussi trois fois moins de places d’accueil pour adultes handicapés, en foyers ou en ESAT. Selon une étude médicale réalisée en 2016 en Guyane, le territoire compterait 3 000 enfants atteints de troubles du spectre autistique, avec une faible proportion réellement identifiée et des capacités largement insuffisantes en IME ou pour l’aménagement de scolarisation.

Des problèmes de santé plus fréquents

Ces retards sont d’autant plus préoccupants que l’état de santé de la population est globalement moins bon que dans les départements de l’hexagone. Selon l’Enquête Santé 2019, 68% des personnes interrogées se déclarent en “bon” ou “très bon” état de santé, soit presque autant que dans l’hexagone (71%), et plus qu’aux Antilles (moins de 60%). En Guyane, cette étude s’est limitée aux communes accessibles par la route, laissant donc de côté celles où l’accès aux soins est le plus limité. Ce qui représente tout de même 10 communes et près de 31 000 personnes en 2020 (11% de la population guyanaise). 

Sur le littoral, on relève tout de même un état de santé moins bon qu’ailleurs en France, avec des difficultés motrices plus fréquentes (10%, 4% dans l’hexagone), des difficultés sévères de vue (8%, contre 2% dans l’hexagone) et une prévalence plus élevée de symptômes dépressifs en Guyane (22 %) relativement au reste de la France (10 %).

Sources : 

Sur le même thême